bureaux A
programme réhabilitation lourde et surélévation d'un immeuble de bureaux existant
lieu Paris 11e, France
client Picture Real State Perspectives
architectes Heros Architecture
surface 1 171 m2
budget 4 000 000 eur ht
mission complète
date 2022 – appel d’offre cours
démarche environnementale RE2020
Le projet se situe sur l’avenue Jean Aicard, occupée en son centre par un espace planté, le square George Sarre, est disposée perpendiculairement à la rue Oberkampf, artère commerçante et animée du XIème arrondissement de Paris. L’intervention s’insère dans un îlot urbain en pleine mutation, avec plusieurs projets de transformation, extension et construction neuve sur l’avenue comme sur la rue parallèle Crespin de Gast. L’enjeu majeur du projet : reconstruire la ville sur elle-même, travailler avec l’existant pour le réactiver, le magnifier et le faire évoluer afin de répondre aux enjeux environnementaux et sociétaux de notre temps.
La parcelle est aujourd’hui occupée par un bâtiment sur l’entièreté de sa surface. Celui-ci forme un ensemble hétérogène composé d’édifices de hauteurs et d’époques différentes : la partie la plus ancienne semble dater du XIXème siècle, tandis que les éléments les plus récents remontent au milieu du XXème siècle. On peut ainsi rattacher cet ensemble à l’architecture faubourienne. De même, la parcelle renvoie à la morphologie courante dans ce tissu faubourien, caractérisé par des parcelles allongées disposées perpendiculairement aux voies, munies de cours dans le sens de la longueur en direction desquelles les bâtiments s’ouvrent.
L’édifice est aujourd’hui adressé sur l’avenue Jean Aicard, ce qui n’a pas toujours été le cas. Cette voie fut percée en 1936 en démolissant un ilot étroit bordé par deux voies, le passage et l’impasse de Ménilmontant. Ce geste soustractif, héritier de l’urbanisme Haussmannien, reste relativement récent à l’échelle de la fabrication des tissus urbains. Cependant, ici l’avenue nouvelle n’a pas été accompagnée de façades neuves en son long. Au contraire, les façades aveugles implantées initialement en mitoyenneté se sont maintenues sur la nouvelle voie, elles constituent une part importante de son paysage urbain. A rebours des façades haussmanniennes, caractérisées par ses alignements, leur ordonnancement, leur homogénéité et l’utilisation de la pierre de taille, le percement de l’avenue Jean Aicard apparait comme une coupe sur un tissu faubourien. Une architecture blanche, une architecture de plâtre, une ville pittoresque marquée par une mixité de formes et de façades ainsi que des ruptures de gabarits importantes.
Le projet a pour ambition de s’inscrire en continuité de cette architecture faubourienne tout en prenant la liberté de réinterpréter certains traits. Adopter une démarche qui vise à greffer, raccorder notre intervention sur un bâtiment existant, tout en exprimant la trace d’une rupture de gabarit antérieur. Le but étant de préserver au mieux la séquence urbaine au sein du paysage de l’avenue Jean Aicard, en proposant un certain degré d’ouverture de la surélévation en direction de l’avenue et du parc.
Le geste fondateur du projet consiste à retrouver la cour initiale, visible dans le cadastre de la fin du XIX. Par un jeu de soustraction la parcelle disposera à nouveau d’un espace extérieur composé d’un porche, en lien avec l’avenue puis un jardin, en pleine terre, allant jusqu’au fond de la parcelle. Dans cette séquence l’espace se pince et se dilate au fur et à mesure, comme souvent dans les ilots faubouriens. La porosité visuelle et spatiale de la parcelle assurée par le porche permet la continuité biologique et paysagère entre le square Georges Sarre et le jardin en cœur d’îlot. Ce dernier sera conçu comme un lieu de contemplation, d’agrément, de calme, un petit oasis de verdure.
Sur rue, le bâti existant viendra loger une surélévation de 3 niveaux, présentant une échelle suffisante pour s’adresser à l’avenue Jean Aicard, en tant que pièce urbaine, tout en restant en-dessous des 8 étages de l’immeuble d’en face. La toiture de ce volume forme un double « shed » sous lequel vient se loger une mezzanine, donnant sur une double hauteur et s’exprimant en façade avec une double baie. Outre la qualité spatiale et bioclimatique (ventilation et lumière du Sud) qu’il apporte, ce jeu de toiture enrichie la lecture du volume à travers une référence au passé artisanal et industriel du quartier. Ce couronnement vient souligner le caractère singulier du projet tout en dialoguant avec les codes architecturaux hérités du site.
La façade existante sur l’avenue est conservée et constitue un « socle » sur lequel vient reposer la surélévation. La composition de la façade est le fruit d’une recherche à la fois de continuité avec les façades voisines, leur architecture faubourienne, mais aussi d’une recherche d’une écriture architecturale propre à notre époque, propre à ce bâtiment singulier. Le but étant de concilier le souhait d’une architecture « silencieuse » sans faire disparaître l’intervention, mais au contraire, en affirmant la façon dont elle se raccorde et se greffe dans ce tissu.
L’enveloppe des étages en surélévation est imaginé en bois et béton de chanvre, matériau biosourcé à forte inertie thermique qui présent un comportement hygrométrique et un déphasage thermique très bénéfique pour les futurs usagers. Revêtue d’un enduit de teinte claire, dans l’esprit de l’architecture blanche typiquement faubourienne présente sur l’avenue ; la surélévation présente une texture striée qui cherche à se distinguer de l’existant, en enduit lisse.
Côté cour, le bâtiment existant est surélevé de 2 étages, permettant d’investir les héberges existants du n° 20 de l’avenue et celui en fond de parcelle. Ce volume est conçu pour établir une harmonie avec le bâti existant tout en dialoguant avec le nouveau volume sur rue. Étant donné sa disposition enclavée et son orientation Nord, le rez-de-chaussée ouvert sur le jardin et la surélévation seront largement vitrés.
Côté cour, la surélévation est vêtue d’un bardage bois, en lames verticales, lasuré de teinte claire, limitant ainsi le contraste avec l’enduit. Le traitement du bois aura aussi pour but d’en assurer la pérennité. On retrouvera ce matériau aussi au niveau du porche ainsi qu’en rez-de-chaussée sur une partie de la façade en fond de parcelle. Ce choix d’une matérialité plus légère côté cœur d’ilot s’inscrit dans l’imaginaire de la cour faubourienne, petit microcosme en lui-même, souvent constitué de nombreux appentis à la matérialité plus frugale. La toiture du bâtiment sur cour vient déborder du volume pour protéger le bardage.
Le projet est conçu dans une recherche permanente d’équilibre entre histoire et renouveau, conservation et transformation, bioclimatisme low-cost et systèmes de rafraichissement sans climatisation. Le mode constructif est hybride et cherche à trouver la bonne relation de complémentarité entre les différents matériaux : le bois (surélévation), le métal (reprise sur l’existant), le béton de chanvre (enveloppe) et la maçonnerie (noyaux) dialoguent en harmonie pour répondre aux enjeux du programme.
Le confort d’été est obtenu de façon passive sur l’ensemble du projet ; la démarche adoptée vise à éviter le recours à la climatisation. La ventilation naturelle nocturne et/ou matinale de façade à façade et via les sheds, l’occultation extérieur par des stores toiles, l’emploi du béton de chanvre nous permettent d’apporter une réponse ambitieuse aux besoins environnementaux et climatiques.